Le maire d'Issoudun, en France, a pu affirmer qu'"une ville qui n'est pas capable d'apporter de la culture aux citoyens est une ville économiquement condamnée". Près de nous, l'éditorialiste et essayiste Alain Dubuc a montré que lecture (et lecture publique) et prospérité collective vont de pair au Canada*, dans un ouvrage fondé sur un truisme, à savoir que plus une société est collectivement riche, plus elle peut effectuer facilement des redistributions généreuses à ses citoyens. Que penser de ce rapprochement entre prospérité et lecture? Qu'une société prospère comprend forcément une plus grande proportion qu'ailleurs de personnes fortement scolarisées? Que celles-ci ont davantage tendance à lire les livres que d'autres? Qu'un public qui lit a meilleure "conscience de l'univers plutôt que d'y être enclos comme un objet et emprisonné dans la fatalité"**? Que sans la culture, il n'y a que "consommation, survie, réflexes"***? Probablement tout cela à la fois. On ne peut nier que ce n'est pas au sein d'une population ignorante, dont la culture déjà faible n'est pas ou peu développée, que surigront des gens entreprenants, des groupes porteurs de projets innovateurs, une communauté prête à soutenir ces projets. (...) La culture n'est pas une affaire d'érudits, de snobs ou d'originaux, mais celle de tout le monde, à des portées et à des modalités diverses selon les groupes et les individus, pour possiblement avoir meilleure "conscience de l'univers"* plutôt que d'y être ballottés comme des fétus de paille ou traités comme des pions. Il s'agit au plus haut point, encore une fois de dignité. Respecter celle-ci peut aller de pair avec intérêt, plaisir, voire divertissement.
Pourquoi ne pas transposer sur la bibliothèque publique ce qui a fait la notoriété de notre télévision (avant l'avènement de la "télé réalité" cependant, qui n'est pas la réalité de toute façon)? Elle a su séduire, tout en ouvrant sur le monde. À l'instar de la télévision qui, tout en nous divertissant, nous a appris à nous regarder, parfois sans complaisance, la bibliothèque publique, par les trésors qu'elle renferme, permet d'avoir une meilleure conscience de soi et de l'univers. En transmettant la culture, elle fait davantage que de distraire, elle rend à l'homme sa dignité.
*Dubuc, Alain. 2006. Éloge de la richesse; des idées pour donner au Québec les moyens de ses ambitions.– Monttréal: Voix parallèles. 335 p.
**Dumont, Fernand. 1996. Une foi partagée. Montréal: Bellarmin. 301 p.
***Laplante, Laurent. 2002. "Plaidoyer pour la lecture". Dans Politique culturelle et bibliothèque publique: lieu de diffusion des savoirs. Sous la dir. de Marie Goyette. Montréal : Éditions ASTED: 107-120.
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